L’Empire de la nature est une histoire des jardins botaniques établis dans les colonies européennes des Caraïbes, d’Asie et d’Afrique entre la fin du XVIIIe siècle et le début du XXe siècle. En tous lieux, ces jardins, enclaves de nature ordonnée, symboles d’une sauvagerie domptée, donnent à voir la maîtrise du monde naturel et sont institués comme des outils de la domination coloniale.
Lieux de savoir botanique, pépinières de vente de plantes pour la colonie, espaces de contact pour les sociétés coloniales, les jardins botaniques sont envisagés dans leur dimension savante globale, leur fonction politique et leurs usages économiques. Aux mises en réseau entre les institutions métropolitaines et les jardins coloniaux répond une micro histoire de sites dont les destinées varient en fonction des empires et des territoires.
L’Empire de la nature est également une histoire des jardins à ras de terre, se penchant sur les choix d’aménagement de l’espace, d’ordonnancement des espèces, d’ouverture ou de fermeture sur la ville coloniale. Celles et ceux qui traversent le jardin, qui y vivent, et surtout qui y travaillent sont au cœur de l’enquête. Savants étrangers, collecteurs et collecteuses de plantes, colons, planteurs, populations colonisées, travailleurs engagés sont mobilisés dans des entreprises qui reflètent et mettent en œuvre les ressorts de l’impérialisme européen.
Dans les jardins, à l’ombre des allées de palmiers, lors des concerts dans les kiosques à musique, à l’herbarium ou dans la bibliothèque, au cœur des baraquements des jardiniers, dans la mise en ordre de la nature, mais aussi dans ses désordres, s’exprime toute la complexité des rapports entre savoirs, pouvoirs et construction sociale en situation coloniale.