La justice à l’île Bourbon (1815-1848). L’instauration d’une justice métropolitain, la réalité d’une justice créole et créolisée
Thèse soutenue le 24 novembre 2022, sous la co-direction d’Hélène Blais et de Florence Renucci
L’île Bourbon, vierge d’habitants et de toute société indigène, fut colonisée par la France à la fin du XVIIe siècle. Occupée par les Anglais de 1810 à 1815, l’île Bourbon fut remise à la France le 3 avril 1815 en exécution du traité de Paris du 30 mai 1814. Louis XVIII dut alors renouer une relation politique et économique avec cette colonie esclavagiste de l’océan Indien. Une des premières réformes porta sur l’organisation de la justice. Sous l’égide du ministère de la Marine et des Colonies, l’île Bourbon fut dotée de tribunaux et d’une cour royale similaires à ceux de métropole, composés de magistrats fonctionnaires censés rendre une justice indépendante du pouvoir politique et des influences locales. A cette fin, le ministère eut pour politique de nommer à la tête des juridictions de la colonie des magistrats envoyés de métropole, sans lien avec les habitants, les créoles, et donc imperméables à toute influence amicale ou familiale. Allant plus loin, une ordonnance royale de 1827 fit, d’une part, interdiction aux créoles d’occuper les plus hautes fonctions de la magistrature locale et, d’autre part, interdiction aux métropolitains de se marier avec une créole et de posséder des propriétés foncières, ce qui signifiait également ne pas posséder d’esclaves. La France affirmait sa volonté d’instaurer une justice métropolitaine tant dans son organisation que dans les hommes chargés de la rendre. Jusqu’à l’abolition de l’esclavage de 1848, le pouvoir royal est-il parvenu à accomplir ses desseins d’une justice échappant aux influences locales ? Telle est la question à laquelle cette étude s’efforce de répondre à travers l’analyse des travaux préparatoires des ordonnances portant les réformes et la réalité de la société créole de l’île Bourbon.